A criminal investigation
Watabe Yukichi (1924-1993), reporter photographe indépendant, a couvert la plupart des grands évènements historiques et politiques se déroulant à Tokyo.
En 1958 il se voit accorder l’autorisation exceptionnelle de documenter l’enquête menée par la police municipale de Tokyo relative à « l’affaire du corps coupé » : Le 13 janvier 1958, un nez, deux phalanges et un pénis sont découverts dans un bac à huile à proximité du lac Sembako (préfecture d’Ibaraki). Le lendemain, la police trouve le corps d’un homme de l’autre côté du lac, grossièrement défiguré. Plusieurs doigts sont coupés et l’intégralité du corps est rongée à l’acide, dans le but évident de rendre impossible toute identification.
Il publie une sélection d’images dans le numéro de juin 1958 du magazine Nippon.
La presse en parle
Par Rémi Coignet
« 14 janvier 1958. Lac Sembako, préfecture d’Ibaraki, Japon. Un cadavre défiguré, rongé à l’acide et émasculé est découvert. À titre exceptionnel, le photographe Yukichi Watabe est autorisé à suivre l’enquête. Les photos qu’il en rapporte, quasi cinématographiques, semblent tirées d’un film noir. Watabe est grandement aidé par son personnage principal, l’un des deux inspecteurs, au look de Bogart japonais. Dans un registre et un style différent, A Criminal Investigation évoque le Country Doctor (1948) de Eugene Smith.
Ici comme là, des anonymes sont transmués en acteurs de leur vie. Si Smith était Frank Capra, Watabe serait John Huston. Watabe, et l’editing qui est aujourd’hui fait de ses images, jouent à plein de tous les effets de sens cinématographiques.
Dès les deux premières pages du livre, on assiste à un passage de plan large à plan serré tandis que l’inspecteur arpente les abords du lac. On peut ensuite repérer des plans-séquences, des plans de coupe, des effets de cadrage ou de focale. Sans emphase aucune, ces formes se mettent au service du récit. Le spectateur suit le déroulement de l’enquête : inspection des lieux du drame, phases de doutes, relevé de témoignages, filatures… La forme donnée au livre joue des codes japonais et de ceux du récit policier, sans jamais tomber dans le pastiche. La couverture de toile grège évoque un dossier administratif. Sensation renforcée par le choix de la typographie « Courrier », comme si le texte avait été saisi à la machine à écrire. Quant à l’élastique noir qui vient ceinturer le volume, il fait penser au carnet de notes d’un enquêteur. À l’intérieur de l’ouvrage, l’épais filet noir qui entoure les images, ainsi que l’impression en noir de la page de gauche lorsque l’image est isolée, créent une sensation de fondu. Le blanc qui demeure en haut et bas des pages forme l’écran sur lequel se projettent les images. Le caractère japonais de l’ouvrage est affirmé par le choix du brochage : le sempuyo souvent qualifié de « Japanese binding». »
Co-édition LE BAL - Éditions Xavier Barral
Relié à la japonaise
Toilé avec élastique
210 × 290 mm
100 pages
Photographies noir et blanc
ISBN : 978-2-91517-382-6