« LE VOILE DE KODAK », ARCHIVES GAMMA I

Dire de la radioactivité qu’elle est invisible relève de l’évidence. C’est à ce point vrai que les rayons en eux-mêmes, lorsqu’ils frappent l'oeil, provoquent une lésion, pouvant aller jusqu’à la cécité. Pour autant on ne peut ignorer que la radioactivité est utilisée comme procédé photographique – et cette confusion des deux techniques est à ce point troublante que sans l’invention de la photographie, la bombe nucléaire n’aurait probablement pas existé. C’est en tout cas ce que cherche à établir par l’image « Le voile de Kodak » performance de Stéfane Perraud et Aram Kebabdjian inspirée de cette histoire. Elle puise son énergie dans les fonds d’archives scientifiques, philosophiques et artistiques, qu’elle explore librement pour en projeter une image possible et déformée – et mieux comprendre ce que la radioactivité fait à l’image.

Stéfane Perraud est plasticien, Aram Kebabdjian écrivain. Entre art et science, littérature et documents, technologie de pointe et formes rudimentaires, ils constituent des archéologies de notre temps. Zone bleue film de réalité virtuelle, explore le devenir des déchets nucléaires sur le temps long. Hystérésia, observatoire des satellites zombies, écoute les déchets en orbite dans le ciel. Archives gamma est un cycle de conférences qui explore la civilisation nucléaire et l’humanité qui s’y rapporte. Sur la forme, elle agit sur ces spectateurs comme un maelstrom vertigineux de média et de textes qui pousse les notions de document et de réalisme jusqu’aux limites de la fiction. Une démarche hybride et thématique, utopique et inquiète, drôle et surprenante. Le « Voile de Kodak » est la première conférence de ce cycle.

Plasticien, Stéfane Perraud développe depuis plusieurs années des œuvres où l’art, la science et la fiction se rencontrent et s’interrogent. Dans cette exploration, il nourrit son travail de physique nucléaire, de géographie, mais aussi de romantisme politique, de littérature, et de techniques de pointe, anciennes ou perdues. Son travail a été présenté dans nombre d’institutions dont le Musée des Arts Décoratifs, le Collège des Bernardins, la Triennale de Milan, à iMAL à Bruxelles. Il collabore avec metteurs en scène et chorégraphes dont Trajal Harrell, Eli Commins et Ali Moini.

Aram Kebabdjian est docteur en philosophie, auteur de romans et de nouvelles, et dramaturge. Grand Prix SGDL du Premier Roman, Les Désœuvrés (2015) dresse le portrait d’artistes fictifs dans le milieu de l’art contemporain. Le Songe d’Anton Sorrus (2017) raconte l’histoire d’un son, à l’origine indéfinissable, menant son protagoniste jusqu’aux limites de sa propre rationalité. Pour le théâtre, Aram Kebabdjian travaille aux côtés de Jeanne Candel (Tarquin, L'Oreille de Denis). En 2021, il publie son troisième roman, L’Hymne à la joie.